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Titre: Réforme de la loi de 1881 au Sénat : la liberté d'expression en danger ! 
Auteur: neurone259
Date: Fri 14 Oct 2016 17:11:26 +0200
Lien: https://www.laquadrature.net/fr/liberte-expression-danger

Paris, le 15 octobre 2016 — Le projet de loi « Égalité et citoyenneté » discuté
ces jours-ci au Sénat s'est vu augmenté de deux amendements scandaleux[1], 
portés par la sénatrice Françoise Gatel au nom de la Commission spéciale 
chargée d'examiner le projet de loi « Egalité et citoyenneté ». Ces amendements
rallongent de 3 mois à un an[2] la durée de prescription des délits de presse 
commis sur Internet, et introduisent une différence de traitement entre les 
citoyens et les journalistes d'une part, et la presse « en ligne » et « papier 
» d'autre part. En outre, les amendements adoptés introduisent un glissement du
droit de la presse vers le droit commun[3], sauf pour les journalistes « 
professionnels » signataires d'une charte de déontologie non encore rédigée. 
Ces dispositions ont été négociées entre certains syndicats de patrons de 
presse et la Commission spéciale, en toute opacité. La Quadrature du Net 
s'associe aux protestations communes des sociétés de journalistes, qui n'ont 
pas été consultées, et rappelle que la loi de 1881 dite « sur la liberté de la 
presse » concerne en réalité l'intégralité des citoyens français, qui n'ont pas
d'autre protection de leur liberté d'expression. Y toucher et y introduire ce 
type de discrimination est une atteinte à la liberté d'expression de tous les 
français.

Communiqué commun signé par Le Figaro, Le Monde, l’AFP, Les Échos, Télérama, 
L’Obs, Le Point, L’Express, Mediapart, France Info.fr, Capa, i-Télé-Canal +, 
BFM, Bastamag, ainsi que l’association de la presse judiciaire, l’Association 
des journalistes de l’information sociale (AJIS) et l’Association des 
journalistes économiques et financiers (AJEF) et La Quadrature du Net.

Le 18 octobre, les sénateurs enterreront peut-être la loi de 1881 sur la 
liberté de la presse.

Sous prétexte de lutter contre les abus d’Internet, ils s’apprêtent à remettre 
en cause ce texte fondateur, sans concertation préalable avec les représentants
des journalistes. Les SDJ de 26 médias avaient lancé un appel[4] pour obliger 
le Sénat à revoir sa copie. Mais il est resté sourd à notre appel.

Certes, il a aménagé le texte liberticide, mais la nouvelle mouture reste 
inacceptable.

  * La prescription des délits de presse (trois mois, aujourd’hui) passerait à 
    un an pour les sites web. Autrement dit, il y aura une justice à deux 
    vitesses : pour la presse en ligne, ce sera toujours un an; pour les 
    télévisions et les radios, la prescription sera de trois mois pour 
    l'antenne et d’un an en ce qui concerne les podcasts et les replay. 
    Inacceptable.
  * Le texte prévoit toujours de supprimer une garantie fondamentale des droits
    de la défense. Aujourd’hui, c’est à celui qui s’estime diffamé ou injurié 
    de préciser exactement par quel passage, et de qualifier le délit (injure, 
    diffamation ou autre). S’il se trompe, son action est déclarée nulle par le
    tribunal. Or, le Sénat ouvre la voie à des poursuites dans lesquelles le 
    journaliste devra se défendre sans savoir exactement ce qui lui est 
    reproché. Inacceptable.
  * Pour le Sénat, les journalistes professionnels ne pourraient pas faire 
    l’objet d'actions judiciaires sur le terrain de la faute civile. Mais cette
    concession apparente est un leurre : nos sources, elles, seront pleinement 
    soumises au risque d'une action en responsabilité civile, qui pourrait les 
    dissuader de s'exprimer au vu des dommages et intérêts élevés. Les sociétés
    éditrices des journaux le seront tout autant. Inacceptable.

La liberté d'expression est une liberté fondamentale qui mérite beaucoup mieux 
que ce bricolage législatif. Nous, sociétés de journalistes, réitérons notre 
appel à la mobilisation la plus large contre un projet de loi liberticide qui 
met en péril l’un des piliers de la démocratie, consacré par le Conseil 
constitutionnel et la Cour européenne des droits de l’Homme.

La Quadrature du Net s'associe à ce communiqué et soutient la position des 
journalistes, mais rappelle cependant qu'en plus de faire une différenciation 
entre journalistes, les Sénateurs s'apprètent à creuser le fossé entre les 
journalistes qui adhèreraient à une future charte déontologique et les autres 
personnes, citoyens ou journalistes non adhérents à cette charte. Pour rappel, 
la loi de 1881
dite « sur la liberté de la presse » concerne en réalité l'ensemble de la 
liberté d'expression en France. Il n'est pas acceptable d'avoir une telle 
différence de traitement entre l'expression des citoyens et celle des 
journalistes professionnels. La liberté d'expression est un droit 
constitutionnel qui doit bénéficier à l'ensemble des citoyens sans distinction 
de profession. Instaurer des délais de prescription différents pour les 
journalistes et les non-journalistes est une rupture du principe d'égalité des 
citoyens. 

Liens:
[1]: http://www.nextinpact.com/news/101721-apres-concertation-avec-syndicats-journalistes-reforme-loi-1881-revue-au-senat.htm (lien)
[2]: http://www.senat.fr/amendements/2015-2016/828/Amdt_749.html (lien)
[3]: http://www.senat.fr/amendements/2015-2016/828/Amdt_748.html (lien)
[4]: http://www.lefigaro.fr/vox/medias/2016/10/07/31008-20161007ARTFIG00082-menaces-sur-la-liberte-de-la-presse.php (lien)