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Titre: Finissons-en définitivement avec CETA !
Auteur: neurone130
Date: Fri 10 Feb 2017 11:43:18 +0100
Lien: https://www.laquadrature.net/fr/finissons-en-definitivement-avec-CETA
Paris, 10 février 2017 — Le 15 février, le Parlement européen se prononcera au
sujet de la ratification de CETA1[1], l'accord de libre échange entre l'Union
européenne et le Canada. En choisissant d'approuver cet accord, les membres du
Parlement européen permettraient son entrée en application partielle et
ouvriraient la porte à la suite du processus législatif pouvant conduire à son
application complète et définitive. Au contraire, le rejet de l'accord lui
porterait un coup fatal, à l'image de celui d'ACTA en juillet 2012. Au-delà de
son processus d'élaboration inacceptable, CETA menace gravement nos libertés et
droits fondamentaux. Ainsi, La Quadrature du Net appelle les membres du
Parlement à s'y opposer fermement.
Négocié à huis-clos par des fonctionnaires du Canada et de l'Union européenne
entre 2009 et 2013, l'accord commercial CETA est apparu dans le débat public en
juillet 2012, à l'occasion de la fuite d'une version de travail[2] reprenant
des passages entiers de l'accord ACTA, tout juste rejeté par le Parlement
européen. Depuis lors, des mobilisations s'organisent dans toute l'Union
européenne et au Canada contre cet accord, et, plus généralement, dans le monde
entier contre les accords commerciaux, notamment TAFTA, TISA ou TPP[3].
De part leur processus d'élaboration même, ces accords posent un grave problème
: plutôt que d'être discutés par des représentant·e·s élu·e·s – avec les
limites inhérentes à la démocratie représentative –, ils sont préparés dans
l'opacité et en association avec des groupes de pression de puissantes
multinationales. Ces négociations sont d'autant plus inacceptables que ces
accords comportent des dispositions concernant les droits fondamentaux et
qu'ils ont vocation à s'imposer aux législations nationales dans la hiérarchie
des normes juridiques. Ce n'est qu'une fois finalisés que ces accords sont
soumis aux Parlements, sans possibilité d'amendement et avec de fortes
pressions pour l'adoption, comme l'illustre les conditions du vote du Parlement
de Wallonie[4].
Pire, adopté par le Parlement européen, la quasi-totalité de CETA entrerait
provisoirement en application avant les consultations des institutions de
chaque État membre, qui pourraient s'étendre sur des années. En effet, les
dispositions de l'accord considérées comme « non mixtes » – c'est-à-dire
concernant uniquement des aspects commerciaux – relèvent de la seule compétence
européenne : cette partie entrerait en application sans attendre les
éventuelles approbations des Parlements nationaux et/ou régionaux, quand bien
même certains réclament d'être consultés[5].
Indépendamment de son processus d'élaboration, le contenu de l'accord met en
danger nos libertés et droits fondamentaux, comme le montrent – entre autres –
les analyses d'EDRi[6] ou de la FFII[7]. Pour le seul domaine du numérique, en
matière de :
* Données personnelles et vie privée : une fois les transferts de données
personnelles entre l'Union européenne et le Canada encadrés par CETA, il
deviendrait en pratique impossible de les limiter ensuite au nom des normes
européennes présentes ou à venir, par exemple dans le cas d'une atteinte
aux droits identique à celle ayant entraîné l'annulation du « Safe Harbor »[8]
par la Cour de justice de l'Union européenne. Alors que le Canada est
membre de l'alliance des Five Eyes2[9], dont les révélations d'Edward
Snowden et d'autres lanceur·se·s d'alerte ont largement démontré qu'elle
participe à la surveillance massive et illégale des populations, ce point
est particulièrement inquiétant.
* Droits d'auteur et des brevets : si les mesures répressives issues de
l'accord ACTA ont disparu de la version finale de CETA, l'accord contient
tout de même des dispositions dangereuses dans ces domaines et imposerait
un durcissement du droit canadien, notamment pour la protection des
brevets. Surtout, il inscrirait les dispositions juridiques actuelles dans
un texte situé à un niveau supérieur dans la hiérarchie des normes et
limiterait grandement toute possibilité de modification future, par exemple
pour favoriser l'accès au savoir ou le partage et le remix de la culture.
* Système juridique parallèle : adopté, CETA permettrait aux multinationales
d'attaquer devant un tribunal d'arbitrage ad hoc les États dont elles
estimeraient qu'ils portent atteinte à leurs intérêts ou pour ce qu'elles
considéreraient comme une « expropriation indirecte » ou un « traitement »
non « juste et équitable ». Les nombreux exemples[10] de recours abusifs
permis par des mécanismes similaires dans d'autres accords laissent
craindre qu'un tel dispositif empêcherait les États membres d'adopter des
lois progressives, par exemple en faveur de la protection de la neutralité
du Net, de la priorisation du logiciel libre, de la protection des données
personnelles ou du partage en ligne.
Au-delà des enjeux numériques, l'accord entraînerait un net recul dans de
nombreux autres domaines, notamment en matière d'environnement, de droit du
travail ou de protection de la santé. Pour toutes ces raisons, La Quadrature du
Net appelle les membres du Parlement européen à rejeter fermement et
définitivement CETA lors du vote en session plénière prévu le 15 février.
Dans la foulée de l'élection houleuse[11] d'Antonio Tajani à la tête du
Parlement européen et à l'approche d'élections majeures aux Pays-Bas, en
Allemagne et en France, les rapports de force et les positions des groupes
politiques de l'institution se transforment et rendent difficilement prévisible
l'issue du vote. Sans surprise, la plupart des conservateur·rice·s (PPE et CRE)
et des centristes (ADLE) semblent acquis·es à CETA, tandis que les groupes des
écologistes[12] (Verts/ALE), de la gauche unitaire[13] (GUE/NGL) et des
nationalistes (ENL) s'y opposent. Le groupe décisif qui pourra faire basculer
le vote sera donc celui des sociaux-démocrates (S&D), divisé sur la question :
alors que les élu·e·s allemand·e·s du groupes sont favorables à CETA, les
élu·e·s français·es affichent leur opposition[14] – pendant que leurs collègues
de l'Assemblée nationale affinent leurs convictions[15]. Le site CETA Check[16]
recense et centralise les promesses de vote et permet d'entrevoir l'équilibre
actuel des positions.
Afin de permettre à toutes et à tous de contacter – gratuitement et simplement
– les membres du Parlement européen et tenter de les convaincre de s'opposer à
CETA, La Quadrature du Net démarre une campagne PiPhone[17] et invite tout un
chacun à agir et participer aux différentes mobilisations en cours. Sans
attendre et jusqu'au vote du 15, informons-nous d'avantage sur les conséquences
de l'accord, partageons ces informations autour de nous et faisons entendre nos
voix afin d'enfin arriver au rejet de CETA !
* 1.[18]Canada-EU Trade Agreement ou Accord Économique et Commercial Global
en français. La version finale du texte est en ligne ici[19].
* 2.[20]Five Eyes[21] désigne l'alliance des services de renseignement de
l'Australie, du Canada, des États-Unis, de la Nouvelle-Zélande et du
Royaume-Uni.
Liens:
[1]: https://www.laquadrature.net/fr/rss.xml#footnote1_r5ww9gs (lien)
[2]: https://www.laquadrature.net/fr/ceta-le-zombie-dacta-doit-subir-le-meme-sort (lien)
[3]: https://www.laquadrature.net/fr/4-ans-rejet-ACTA-ou-en-sommes-nous-1-2 (lien)
[4]: https://www.monde-diplomatique.fr/2017/01/JENNAR/56981 (lien)
[5]: http://www.lefigaro.fr/flash-eco/2017/02/02/97002-20170202FILWWW00333-l-assemblee-adopte-une-resolution-contre-le-ceta.php (lien)
[6]: https://edri.org/ceta-puts-protection-privacy-and-personal-data-at-risk/ (lien)
[7]: https://blog.ffii.org/ceta-places-itself-above-eu-charter-of-fundamental-rights/ (lien)
[8]: https://www.laquadrature.net/fr/safe-harbor-invalide-CJUE (lien)
[9]: https://www.laquadrature.net/fr/rss.xml#footnote2_xpftkrr (lien)
[10]: http://www.bastamag.net/5-5-L-arbitrage-est-un-moyen-par-lequel-les-pays-riches-disciplinent-les-pays (lien)
[11]: https://www.mediapart.fr/journal/international/170117/un-conservateur-italien-mele-au-dieselgate-elu-la-tete-du-parlement-europeen (lien)
[12]: http://ttip2016.eu/blog/id-12-reasons-the-greenefa-group-are-opposed-to-ceta.html (lien)
[13]: http://www.guengl.eu/policy/publication/stop-ceta (lien)
[14]: http://www.deputes-socialistes.eu/ceta-cest-assez/ (lien)
[15]: http://www.lcp.fr/actualites/resolution-sur-le-ceta-le-groupe-ps-sabstient-pour-concilier-les-positions-de-hamon-et-du (lien)
[16]: https://cetacheck.stop-ttip.org/ (lien)
[17]: https://piphone.lqdn.fr/ (lien)
[18]: https://www.laquadrature.net/fr/rss.xml#footnoteref1_r5ww9gs (lien)
[19]: http://ec.europa.eu/trade/policy/in-focus/ceta/ceta-chapter-by-chapter/ (lien)
[20]: https://www.laquadrature.net/fr/rss.xml#footnoteref2_xpftkrr (lien)
[21]: https://fr.wikipedia.org/wiki/Five_Eyes (lien)
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