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path: root/Et_soudain_trident_mdia_guard_palpa_internet.txt
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Titre: Et soudain, trident média guard palpa internet
Auteur: Bruno
Date: Sat 03 Dec 2011 18:04:50 +0100
Lien: https://blog.spyou.org/wordpress-mu/2011/12/03/et-soudai-trident-media-guard-palpa-internet/

[Ce titre a des relents de "sexe par surprise", vous trouvez pas ? Y'en a qu'on
menace de mettre en prison pour ça !]
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[image 2: 20111203 - surprise][2]

Crédit photo : Jeremy Brooks

Démarrons par une petite remise en situation :

  * Trident media guard (TMG) est la société missionnée par les ayants droits 
    pour effectuer des relevés sur les réseaux peer2peer dans le cadre de notre
    ami le bidule gradué d’hadopi.
  * L’ALPA est l’association de lutte contre la piraterie audiovisuelle. Non, 
    pas une association qui lutte contre les films de pirates mais qui lutte 
    contre ceux qui piratent les films.
  * Ces deux bidules (désolé, j’ai pas trouvé d’autre mot) et quelques autres 
    sont présents dans un document publié hier par PCInpact[3] qui constitue 
    l’assignation des gros FAI français et des gros moteurs de recherche dans 
    le but de faire disparaître le site allostreaming et ses petits copains de 
    la face de la toile, en tout cas en france (document passé à l’OCR sans 
    retouche dispo ici[4]).
  * Allostreaming et ses copains sont des sites indexant les vidéos présentes 
    sur d’autres sites et n’héberge aucun contenu contrefait.

Ces messieurs ayants droits se vantent, dans leur assignation, de vouloir 
(point 228) tirer les leçons des actions en justice précédentes en matières de 
blocage de site. C’est tout à leur honneur si seulement c’était vrai. Ou alors 
ils n’ont pas tiré les bonnes leçons. Il suffit, pour s’en convaincre, de lire 
leur définition de la neutralité du net (point 278) qui, à grand renfort de 
références juridiques, tente de prouver par A + B que le réseau ne peut être 
neutre que pour les contenus licites. De là à tirer la conclusion que la 
neutralité est une chimère qui n’a strictement aucune chance d’exister, il n’y 
a qu’un pas, et on les sent bien avoir l’envie de le franchir tout en se 
retenant.

On sent bien également qu’ils ont fait des efforts.

Techniques, en premier lieu, puisque dès les premières lignes de leur 
assignation (point 2), les voilà partis dans une tirade sur la déduplication 
des données stockées permettant à ces salauds de diffuseurs de fichiers 
illégaux d’économiser de l’argent. Par contre, ça se gâte immédiatement (point 
3) à propos de la définition du streaming.

Une fois pour toutes, messieurs mesdames, le streaming est un sous-ensemble du 
téléchargement qui permet de visionner un média pendant qu’il est en train 
d’être téléchargé. Il est notoirement connu pour l’audio et la vidéo où le 
chargement a quelques secondes d’avance sur le visionnage ou l’écoute mais il 
s’applique aussi, par exemple, à l’image qui devient de plus en plus nette à 
mesure que le téléchargement se poursuit. Que le média consulté soit stocké ou 
pas sur le disque dur ou dans la mémoire de l’ordinateur de l’utilisateur n’est
qu’un choix effectué par les développeurs du logiciel utilisé.

Quelle que soit la technologie employée il y a donc reproduction du contenu, à 
minima dans la mémoire vive de l’ordinateur, mais aussi sur le disque dur, et 
dans la grande majorité des cas, ce stockage n’est pas éphémère pour permettre 
de rejouer le média ultérieurement sans avoir à le télécharger de nouveau.

La métaphore de la baignoire est celle qui illustre encore le mieux cette 
affaire : le streaming est au direct download ce que la douche est à la 
baignoire. Et de la même manière que vous ne pouvez empêcher quelqu’un de se 
servir de l’eau d’une douche pour remplir une baignoire, vous n’empêcherez 
jamais la récupération du média diffusé en streaming.

Mais ils font également des efforts philosophiques cachés derrière des analyses
légales. Ils affirment par exemple (point 15) qu’un annuaire de lien n’est en 
rien concerné par les lois protégeant la liberté d’expression. Ils donnent 
aussi dans la fraternité et l’égalité en jurant, ô grand dieu, qu’ils ont bien 
fait attention d’assigner tout plein de FAI (point 107) pour éviter que 
certains, non assignés, ne profitent du blocage opéré par les autres pour 
récupérer des clients. J’en compte 7 dans leur assignation, soit en gros 100 
fois moins que la réalité. Raté pour l’exhaustivité.

Le plus croustillant, finalement, reste probablement le moment (point 40) ou 
ils expliquent qu’ils ont du regarder 1200 épisodes de série. J’aurais adoré 
être le mec qui a passé 6 mois le cul sur une chaise à regarder des séries en 
étant payé.

Je pourrais continuer longtemps, j’en ai 4 pages pleines, de ce genre 
d’idioties. Mais entrons dans le vif du sujet : la palpation.

Ces gens veulent donc empêcher, pour le territoire français, l’accès à quelques
sites. Pour savoir comment faire au mieux, ils ont mandaté une boite experte 
des réseaux qui a conclu que le blocage par DNS assorti du blocage par IP (si 
vous avez décroché, lisez le projet de livre vert sur le filtrage[5]) n’était 
pas suffisant puisque, ô rage, ô désespoir, ces satanés sites pouvaient changer
d’IP et de nom.

La conclusion des experts est donc qu’il faut que le juge ordonne de bloquer 
également les sites renommés ou déménagés. Et comme les ayants droits ne 
veulent pas risquer d’avoir à payer les FAI pour faire ce boulot de traçage, 
ils proposent de le faire eux-mêmes. C’est quand même sympa de leur part.

La demande est donc toute simple : merci d’ordonner aux grands FAI français de 
nous donner les droits d’administration sur leur réseau BGP et sur leur 
infrastructure DNS pour pouvoir nous-mêmes modifier la configuration du 
blocage. En échange, on promet que ce seront des agents assermentés qui 
effectueront les vérifications idoines pour s’assurer qu’on ne bloque pas 
n’importe quoi.

Je suis très impatient d’entendre ce que les FAI vont en dire le 15 décembre. 
Une chance que j’ai prévu d’être en province ce jour là, sinon, je serais allé 
égorger des petits chats pour les éparpiller tout autour du TGI.

Je suis encore plus impatient de voir ce qu’ils vont inventer quand ils auront 
appris qu’internet n’est pas constitué que de 7 FAI et que même si on les 
enlève tous, ils restera de l’internet. Vous imaginez, level3, global crossing 
et tata communications en tête à tête au TGI entrain d’essayer de comprendre ce
qu’ils font là ?

Et puis surtout, je suis très très impatient d’être à début janvier pour 
recevoir enfin mon exemplaire de la liste des 1000 sites pédophiles les plus en
vue sur le net pour pouvoir informer tous mes routeurs qu’il faudra les filtrer
en total respect de l’article 4 de la LOPPSI.

Liens:
[1]: http://www.flickr.com/photos/jeremybrooks/3330306480/ (lien)
[2]: http://blog.spyou.org/wordpress-mu/files/2011/12/20111203-surprise-300x300.jpg (image)
[3]: http://cdn.pcinpact.com/media/APC_FNDF_SEVN_TGI_Paris_blocage_AlloStreaming_HD.pdf (lien)
[4]: http://blog.spyou.org/wordpress-mu/files/2011/12/20111202-assignationallo.pdf (lien)
[5]: http://blog.spyou.org/wordpress-mu/2011/10/17/livre-vert-sur-le-filtrage/ (lien)