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Titre: De peer en peer
Auteur: Bruno
Date: Wed 25 Jan 2012 23:28:50 +0100
Lien: https://blog.spyou.org/wordpress-mu/2012/01/26/de-peer-en-peer/

[La rédaction de ce billet à donné lieu à la mise à mort d'une tablette de 
milka noisette. RIP.]
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[image 1: pirate]

On s’accorde à marquer le début de ce que presque tout le monde appelle le 
peer2peer en juin 1999 avec la naissance de Napster[2]. En plein gonflement de 
la bulle internet, les FAI voient déferler quantité de nouveaux abonnés qui 
n’ont d’autre idée que d’aller chercher de la musique sur ce nouvel outil 
(presque) tout beau (presque) tout neuf.

En réalité, internet dans son intégralité fonctionne sur un mode pair à pair, 
puisque, si vous avez tout bien lu le présent blog, vous savez que votre 
connexion internet n’est (en principe) pas différente de celle utilisée par les
serveurs de (feu) megaupload, si ce n’est le débit disponible. Comprendre par 
là que vous pouvez, comme (théoriquement) tout le monde devenir émetteur de 
service sur le réseau avec votre petit ordinateur planté derrière sa machinbox.
Vous êtes donc un pair comme un autre sur le réseau et discutez de pair à pair 
avec les autres.

Ce qu’on entend généralement par peer2peer, c’est le fait que deux abonnés à 
internet s’échangent directement des données sans passer par l’intermédiaire 
d’un serveur. Enfin, pas par l’intermédiaire d’un serveur qui va stocker 
l’information en question en tout cas.

Le fonctionnement de Napster était relativement simple, vous étiez connecté à 
un serveur central qui ne faisait office que de répertoire listant l’ensemble 
des fichiers présents chez les autres connectés et vous demandiez à ce serveur 
« dis moi qui a le dernier single de Céline Dion », le serveur vous disait « 
c’est le type là-bas » et après vous alliez discuter avec « le type là-bas » 
pour récupérer le fichier.

La « mise à mort » de Napster a été relativement simple, il a suffi de retirer 
le serveur central. Adios Amigos. RIP, juillet 2001. C’était le début de la 
fin.

Ont suivis énormément de logiciels plus ou moins réussis, avec des modes de 
fonctionnement et des structures techniques pas toujours forcément réussis, 
pour finalement arriver à ce que seuls 3 ou 4 réseaux différents prennent le 
dessus, voir s’entremêlent.

L’un de ceux là est bittorent[3], né juste avant la mort de Napster en 2001. Le
nom désigne à la fois le protocole employé, le réseau peer2peer et le logiciel 
utilisé. Il est important de noter que bittorent était libre jusqu’à il y a peu
mais que les versions ultérieures à la version 6 ne le seront à priori plus.

Bittorent fonctionne selon un principe un peu différent de Napster, principe 
qui lui assure son immunité à long terme contre toute tentative d’étranglement 
: il n’y a pas d’infrastructure centrale. Ou plus exactement, chacun est libre 
de créer une infrastructure centrale. Ces centres portent le doux nom de 
tracker et ont grosso modo la même fonction que l’antique serveur central de 
napster.

Pour télécharger un contenu sur bittorent (un DVD d’installation de Linux par 
exemple), vous devez obtenir le fichier .torrent correspondant. Ce fichier 
contient, entre autre, de quoi s’assurer que ce que vous allez télécharger est 
bien ce que vous voulez ainsi que les informations pour joindre le ou les 
trackers sur lesquels vous avez une chance de trouver un autre utilisateur qui 
dispose du contenu.
Si pour une raison ou une autre un tracker disparaît de la circulation, 
certains fichiers .torrent deviennent probablement inutilisables, mais 
l’ensemble du système ne s’écroule pas contrairement à Napster.Maintenant que 
vous avez à peu près compris comment ça marche dedans, faisons une digression 
législative.L’autre grande force de bittorent, c’est que lorsque vous 
téléchargez un contenu, vous le mettez en même temps à disposition. Chaque 
petit bloc reçu par l’ordinateur est immédiatement mis à disposition de qui 
voudra venir le chercher. C’est le principe de distribution le plus efficace en
ce qui concerne l’occupation du réseau et la répartition de la charge. Lors de 
la mise à disposition d’une nouvelle version de FreeBSD par exemple, il est 
incomparablement plus rapide de venir se servir sur bittorent que de le 
télécharger depuis un miroir FreeBSD.En gros 10 ans après la mort de Napster, 
débarquement d’hadopipour qui bittorent doit représenter le gros de l’activité.[image 4: hadopientreprise]
Les machines de TMG (vous savez, la boite privée dont on ne sait rien, 
missionnée par les ayants droit pour surveiller les réseaux peer2peer, qui 
envoie des saisines à hadopi en disant « bouuuhh la vilaine adresse IP là-bas 
elle a téléchargé Rihanna !! ») sont, du point de vue du réseau, des 
utilisateurs bittorent comme les autres, à ceci prêt qu’ils demandent les mêmes
oeuvres aux trackers publics en permanence pour récolter les adresses IP des 
gens qui les partagent. Elles vont ensuite commencer le téléchargement chez 
chacun pour recueillir « une preuve » et envoyer le tout ficelé dans un joli 
fichier chiffré à hadopi par l’entremise d’un disque dur qui prend le train 
pour faire Nantes-Paris suite à une petite blague[5]l’été dernier impliquant un
« serveur de test » et un jemenfoutisme sécuritaire terriblement banal dans les
boites hypes qui font des trucs bizarres dans les internets.Ensuite, si hadopi 
pas contente, hadopi t’envoyer un mail disant « accès internet pas bien servir 
piratage attention bouuuh méchant ! ». Si toi rien faire, hadopi envoyer un 
courrier recommandé disant pareil. Si toi toujours rien faire, hadopi convoquer
toi pour te dire pareil. Si toi toujours rien faire… on sait pas… le cas ne 
s’est encore jamais présenté.

Bref, à peu près au même moment, de plus en plus de sites se mettent à proposer
de télécharger de la vidéo comme des porcs sur de gros serveurs. Au début, 
c’est la fête, pas de pub, pas besoin de payer, en gros tout comme le peer2peer
sauf que ça pédale à fond les ballons de la connexion et qu’il n’y a pas besoin
de partager ses fichiers avec les autres pour avoir bonne conscience.

Et puis, avec le temps, il faut bien gagner de l’argent, donc ces plateformes 
mettent soit de la pub soit proposent des abonnements payants permettant 
d’éliminer des restrictions inventées pour l’occasion et imposées à ceux qui ne
paient pas.

Les deux grands représentants mondiaux de ces choses sont Youtube et 
Megaupload. Le premier n’a jamais proposé de version payante (en tout cas pas 
pour l’utilisateur final) et a réussi à négocier des deals avec des divers 
ayants droit de l’image animée et du son, deals leur assurant une certaine 
tranquillité judiciaire en échange d’un partage des revenus publicitaires. Le 
second, il a pris du pognon dans tous les sens et rien négocié du tout, et 
chacun sait ce qu’il est devenu.

C’est la suite qui est intéressante. Que s’est-il passé, la semaine dernière, 
après que le megabidule ait disparu du réseau ? Eh ben pas grand chose en 
vérité. Un petit trou d’air dans certaines fibres, principalement chez 
l’hébergeur principal, Carpathia, mais on ne les plaindra pas trop vu qu’ils 
s’adonnent aussi à l’hébergement de sites officiels américains qui doivent bien
leur faire gagner leur vie.

Pour le reste du réseau, certes un petit creux le temps que les gens se rendent
compte que « non, megaupload est pas juste en panne », le temps de faire deux 
ou trois blagues sur twitter, du genre « Chuck Norris il a toujours accès à 
megaupload », et puis après ?

Et quand le service qu’on aime bien parce qu’on y trouve ce qu’on veut et qu’on
y a ses habitudes n’est plus là, on fait quoi ? Ben soit on en cherche un autre
et on a la surprise d’en trouver un mieux, soit on revient à ses amours 
d’antan. C’est là que, messieurs ayants droit, si je puis me permettre, vous 
avez fait une monumentale boulette. Faire en sorte que votre nouvel ennemi 
public numéro 1 disparaisse sans avoir prévu de filet pour ramasser les 
ouailles qui allaient immanquablement tomber de l’arbre que vous avez secoué, 
c’était juste débile.Oui, c’est vrai, hadopi avait probablement poussé quelques
personnes à abandonner le peer2peer pour se diriger vers megaupload, pusique la
France était première utilisatrice du service avec 10%, suivie de près par le 
Brésil avec 8 et quelques pourcents. Mais beaucoup de gens ont surtout été 
séduits par la simplicité et la diversité présente sur le service. Sans se 
poser la question de « c’est légal ou pas », « c’est mal ou pas », « je tue des
artistes ? » (ou pas).

Résultat des courses après une semaine ? Une partie des anciens utilisateurs de
megaupload sont encore désorientés et vont à la pêche aux infos sur les réseaux
sociaux au risque de se faire avoir par des fishing très réussis, une partie 
s’est redispatchée sur d’autres services du même genre, et puis pas mal de gens
sont revenus au peer2peer. Et ça, c’est pas qu’en France, c’est un phénomène 
mondial.

Exception notable d’un mec franchement pas con, Marc Dorcel, qui a bondi sur 
l’occasion pour proposer ses productions vidéos à prix cassés, au motif que 
quand même, laisser tous ces gens sans porn, c’était pas humain, tous les 
autres, ils ont juste savouré le plaisir d’avoir collé un mec en taule. 
J’espère qu’une majorité a bien compris qu’ils avaient gagné une bataille mais 
repoussé encore de 10 ans l’issue de la guerre ?

Bref, que nous réserve l’avenir ?

Eh ben facile, tout comme la photocopie est encore en train de tuer le livre 
tel un chien rongeant son os alors qu’il n’a plus de dents, on peut considérer 
que « la création » ne va jamais finir de mourir sous les assauts de cet 
enfoiré de piratage et de ce gros vilain internet.

Par contre, on peut être certain que « la chaîne de la création » va s’en 
prendre plein les dents. Parce que oui, le propre d’internet, c’est de réduire 
le nombre et la valeur ajoutée des intermédiaires. Oh on ne s’en débarrasse 
jamais totalement, mais les cartes changent de main.

Et puis on peut avoir surtout une grande confiance dans cette chose vivante 
qu’est internet. Parce que sauf à l’éteindre en bombardant les datacenters qui 
en abritent une bonne part, ce que, si j’étais parmi les oligarques qui sont à 
la tête de nos pays je ferais tout de suite et sans la moindre hésitation, eh 
bien internet continuera de croître et de n’en faire qu’à sa tête.

Et il semble que dans la tête d’internet, il y ait majoritairement l’égalité, 
le partage, la copie, la culture et une certaine idée de la gouvernance du 
monde qui, quand elle apparaîtra devant leur nez, va déplaire à beaucoup.

Tu parlais de peer2peer, non ?
[image 7: network][7]

Crédit photo : Simon Cockell

Oui, c’est vrai, pardon. Toute cette introduction, c’était pour vous parler de 
l’avenir du peer2peer. Internet n’en fait qu’à sa tête, et si suffisamment de 
pays se mettent, comme la France, à tirer à boulets rouges contre le partage 
non marchand, il va s’adapter. Non, attend, on me dit qu’il est déjà en 
train…Comment ? En supprimant purement et simplement le point d’entrée des lois
en question qui reposent toutes sur l’identification de la connexion internet 
ayant servi à partager du contenu. Et quoi de mieux pour ça que de ne 
fonctionner qu’avec des pairs qu’on connaît ? Je connecte mon ordinateur à 
celui de mon collègue de bureau qui lui même est connecté à celui de son frère,
qui lui même…

Alors évidemment, ce sera plus lent, mais pas au point de devoir attendre 1 an 
ou 2 le prochain épisode de ma série préférée. Ça fout la rage de s’être fait 
chier 3 ans à monter un truc qui va plus servir à rien après une paire de 
tweets d’un développeur un peu allumé hein ?

L’étape suivante, c’est d’espionner les communications de tout le monde pour 
trouver les gros vilains pirates et de s’apercevoir que « oh ben zut alors, ils
ont tout chiffré !! » ?

Ou bien l’étape suivante c’est de se débrouiller pour que l’utilisateur lambda 
trouve son bonheur sur les internets « légaux » ?

Je suis un bisounours … Mais j’ai quand même peur qu’ils continuent à confondre
un moment culture et divertissement, valeur et argent, intérêt général et 
lobbys …

Liens:
[1]: http://blog.spyou.org/wordpress-mu/files/2010/08/20100830-pirate-231x300.jpg (image)
[2]: http://fr.wikipedia.org/wiki/Napster (lien)
[3]: http://fr.wikipedia.org/wiki/BitTorrent_(protocole) (lien)
[4]: http://blog.spyou.org/wordpress-mu/files/2010/08/20100825-hadopientreprise.jpg (image)
[5]: http://reflets.info/le-honeypot-de-tmg/ (lien)
[6]: http://www.flickr.com/photos/sjcockell/3251147920/ (lien)
[7]: http://blog.spyou.org/wordpress-mu/files/2012/01/20120125-network-300x222.jpg (image)