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diff --git a/Request_for_comments.txt b/Request_for_comments.txt new file mode 100644 index 0000000..76e455e --- /dev/null +++ b/Request_for_comments.txt @@ -0,0 +1,245 @@ +Titre: Request for comments +Auteur: Benjamin Bayart +Date: Tue 23 Jun 2015 16:20:00 +0200 +Lien: http://blog.fdn.fr/?post/2015/06/23/Request-for-comments + +Le Conseil constitutionnel devrait avoir à traiter de quatre recours qui +tournent autour de la loi sur le renseignement. Pour essayer d'éclairer la +position du Conseil, nous avons regroupé dans un document toutes les remarques +que nous avions à faire sur le sujet. Ça s'appelle un Amicus curiae. + +Le document n'est pas parfaitement finalisé, il nous reste du travail de +relecture (orthographe, typographie, ce genre de choses). Mais surtout, +l'ensemble est volumineux, on a pu rater un morceau. Alors on aimerait bien vos +retours et commentaires. Les délais sont devenus courts. On ne pourra pas +tellement retarder l'envoi au Conseil, du coup si vous voyez des arguments +sérieux à ajouter, le fait de nous les transmettre sous forme de textes prêts à +intégrer dans le document serait une aide précieuse. Nous remettrons le texte +au Conseil constitutionnel jeudi matin. + +La version mise en ligne ici sera régulièrement mise à jour (voir en fin de +billet). + +Conditions déplorables du débat + +La loi sur le renseignement est en gestation depuis un bonne dizaine d'années. +Mais voilà, c'est un texte dangereux politiquement, pour le faire passer il +faut admettre que les services secrets^[1[1]] font quotidiennement des choses +illégales, que toute la hiérarchie le sait, depuis l'agent de terrain jusqu'au +premier ministre. Et que toute cette belle illégalité est gardée secrète. + +Du coup, puisque ça fait 10 ans qu'on essaye de trouver comment donner un peu +de cadre légal à tout ça, le gouvernement a choisi la procédure d'urgence pour +faire voter le texte. Non, ne cherchez pas, on ne peut pas trouver de logique +intelligente là-dedans. On ne peut y trouver qu'une logique liberticide +d'opportunisme politique : dans la foulée des attentats de janvier à Charlie +Hebdo, on profite de l'émotion générale pour passer ce texte, le plus vite +possible, en essayant de réduire les débats au maximum. + +La procédure d'urgence, ça veut dire que le texte est examiné une seule fois +par chaque assemblée. Mais un examen à l'Assemblée ou au Sénat, ça peut être +long. Normalement ça se fait après que les députés ont auditionné des +spécialistes, des opposants, se sont renseignés sur chaque détail du texte pour +le comprendre, pour débattre sereinement de chaque point, pour décider de ce +qu'il faut modifier dans le texte. + +Sur cette loi, ça n'a pas été le cas. Entre l'arrivée du texte à l'Assemblée +nationale et son vote en commission, il ne s'est passé que quelques semaines, +dans un agenda parlementaire déjà chargé. Impossible d'organiser les auditions +nécessaires. Aucune chance d'entendre qui que ce soit d'autre que les ministres +et les patrons des officines de renseignement. Aucune chance de réfléchir à +rien de bien solide. + +Texte brouillon et compliqué + +Et bien entendu, pour nous, aucune chance de pouvoir analyser sereinement le +texte pour alerter le public sur ce qui ne va pas. On a fait ce qu'on pouvait, +mais le texte changeait de version toutes les deux ou trois semaines : d'abord +une version du gouvernement, puis une version sortie de la commission à +l'Assemblée, puis une version votée à l'Assemblée, puis une autre sortie de +commission au Sénat, puis encore une autre votée au Sénat et enfin une dernière +modifiée par la commission mixte paritaire. Et on s'attend à encore une +nouvelle version cet après-midi au Sénat, modifiée par le gouvernement, avant +le vote définitif demain à l'Assemblée. Le tout en trois mois de procédure. +Pour mémoire, sont apparus ce matin les modifications[2] qui seront votées cet +après-midi au Sénat. Ça aura été longuement pas-analysé par les sénateurs, du +coup. + +La qualité du débat parlementaire a été lamentable. Le débat public s'est +concentré sur quelques points précis, qui posaient des problèmes majeurs +faciles à identifier, mais a passé sous silence beaucoup d'éléments de la loi. + +Au final, le texte adopté est presque incompréhensible. Chacune des +dispositions importantes peut être interprétée de plusieurs façons, sans que la +bonne interprétation puisse être rapidement trouvée. Certaines dispositions +disent presque explicitement le contraire de ce que disaient, pendant les +débats, les politiques défendant le texte. Un étudiant de droit qui remettrait +un texte de cette qualité-là à ses profs n'aurait probablement pas la +moyenne... + +Saisine du Conseil constitutionnel + +Le rythme infernal, destiné à empêcher le travail de fond d'avoir lieu^[2[3]] +continue dans le cadre de la saisine du Conseil constitutionnel. + +Le Conseil va être saisi de quatre procédures qui tournent autour de ce texte. + +La première est celle lancée par FDN, La Quadrature et la Fédération FDN. Nous +avons attaqué en début d'année le décret d'application de l'article 20[4] de la +loi de programmation militaire qui définissait la façon dont la police +administrative (qui comprend les services de renseignement) accède à notre vie +privée en ligne. Dans le cadre de cette procédure, nous avons déposé une +question prioritaire de constitutionnalité (QPC)[5]. Cette QPC a été transmise +au Conseil[6] le 5 juin. Voir à ce sujet la conférence faite par Fabien et moi[7] +il y a quelques jours à Pas Sage en Seine, dont la vidéo qui est en ligne +résume tout ça. + +La seconde procédure est celle que le président de la république a promise. Il +espérait pouvoir faire une saisine blanche, comme on faisait jusque là pour les +loi organiques : transmettre tout le texte au Conseil en lui disant dis moi si +quelque chose cloche, merci. Or depuis l'existence de la procédure de QPC, il +ne peut plus faire comme ça. Pour qu'une QPC soit admise, il faut qu'elle pose +une question qui n'a pas encore été traitée. Du coup, une saisine blanche sur +le texte aurait permis de considérer que toutes les questions possibles avaient +déjà été traitées sur la loi, et donc d'empêcher toute saisine ultérieure. Le +Conseil a fait savoir par voie de presse qu'il n'accepterait pas de saisine +blanche, et que donc la présidence de la république serait priée d'indiquer sur +quels points précis elle souhaite un contrôle de la constitutionnalité du +texte. + +Les deux autres saisines devraient venir des sénateurs et des députés. On ne +sait pas encore quelles questions exactes ils vont soulever auprès du Conseil. +On le sait d'autant moins que la version définitive exacte du texte n'est +connue que depuis cet après-midi lors du vote au Sénat. + +Notre amicus curiae + +Lors d'une procédure en justice, quelqu'un qui n'est pas partie à l'affaire +peut transmettre à la cour ses remarques et avis, pour proposer un angle de +lecture du dossier. Ça se fait en général sur les questions d'envergure, genre +dans un recours contre un décret, ou sur la façon d'interpréter le droit en +cassation, ou devant le Conseil constitutionnel ; moins souvent dans les +litiges sur les murs mitoyens ou le droit de passage au fond du jardin de mémé. + +Depuis plusieurs semaines, le groupe de bénévoles qui allie des geeks et des +juristes au nom de nos trois associations (FDN, La Quadrature, et la Fédé) +planche sur la rédaction d'un amicus curiae^[3[8]]. On a essayé de faire court, +on n'y est pas arrivé. + +Régulièrement au cours de notre préparation on a indiqué aux gens avec qui on +est en contact ce qu'on voyait qui clochait dans la loi, ce qui était trop +brutalement contraire au respect des libertés fondamentales. On a en +particulier fait parvenir ça, sous forme de brouillons, de notes, de listes de +points à vérifier et de jurisprudences intéressantes, aux parlementaires qui +travaillent sur leur saisine du Conseil. On ne sait pas encore ce qu'ils ont +retenu dans ce qu'on leur a proposé. + +Request for comments + +Nous attaquons la phase finale de relecture. L'ensemble de nos arguments sont +en place. On espère ne pas en avoir oublié. Mais entre le volume trop important +et les délais trop courts, c'est impossible. + +On souhaite transmettre le document le plus vite possible au Conseil, pour lui +laisser le temps d'en prendre connaissance. Certains des arguments que nous +développons seront très probablement repris tels quels dans la procédure de QPC +que nous avons lancée, au moins là, nous serons certains qu'ils seront pris en +compte, puisque nous sommes parties au procès, et pas simplement des +intervenants extérieurs. + +Cependant, malgré l'urgence, nous avons souhaité diffuser ce soir, juste après +la dernière retouche au Sénat, notre document en l'état pour que toutes les +bonnes âmes qui touchent un peu leur bille en droit public et/ou en droit +constitutionnel puissent nous indiquer ce que nous avons oublié. + +On va être franc : les commentaires de l'ordre de ah mais ça aussi c'est pourri +dans la loi, faudrait écrire un truc dessus, ça ne va pas beaucoup nous aider. +Les propositions plus construites, qui disent la même chose mais en nous +indiquant les jurisprudences utiles, voire qui proposent carrément un version +proto-rédigée de l'argumentaire, c'est plus facile à intégrer. Pour les +commentaires longs, une synthèse de quelques mots ici (pour signaler à la +communauté que ça existe) et un mail à n'importe laquelle des trois +associations, c'est une forme qui marche bien. + +Pour les moins juristes, les commentaires qui nous indiquent les fautes +d'orthographe, les phrases qui n'ont pas de sens, les paragraphes pas terminés, +etc, on est super preneurs. On va essayer d'intégrer tous vos commentaires au +fil de l'eau, et mettre en ligne une nouvelle version du document à chaque +fois. Fin de la partie dans la nuit de mercredi à jeudi, puisque jeudi matin on +dépose le document au Conseil constitutionnel. + +Et sinon, même s'ils ne contribuent pas à la production du document final, les +petits mots gentils, c'est bon pour le moral des troupes. Et vu l'état avancé +de décrépitude fatiguée où nous sommes tous, c'est important. + +Amicus curiae, en PDF[9]: + + * version du 23 juin, 17h, lors de la publication initiale du billet; + * nouvelle version à 19h avec des liens cliquables pour les URL et les + renvois dans le document; + * nouvelle version le 24 juin à 11h45, intégrant des modifications et des + jurisprudences, mais pas encore les corrections faites dans l'outil en + ligne (ça vient...); + * nouvelle version le 24 juin à 16h10, intégrant la quasi-totalité des + corrections proposées; + * nouvelle version le 24 juin à 22h35, intégrant (encore) d'autres + corrections et améliorations; + * nouvelle version le 25 juin à 1h55, intégrant toutes les corrections + identifiées pour le moment; + * dernière version le 25 juin à 8h25, imprimée pour dépôt au Conseil + constitutionnel; + * nouvelle version le 25 juin à 18h05, intégrant quelques arguments et + développements nouveaux, non-transmise au Conseil pour le moment; + * nouvelle version le 29 juin à 13h00, reprend la bonne numérotation des + articles (changé à la dernière minute lors du vote à l'Assemblée, ça nous + avait échappé). + +Lien vers une interface permettant de déposer des commentaires sur le texte : + + * https://lqdn.co-ment.com/text/S2rnR...[10] + +Lien vers le communiqué de presse des amis de la quadrature du net : + + * https://www.laquadrature.net/fr/pub...[11] + +Lien vers le communiqué de presse de la Fédération FDN : + + * http://www.ffdn.org/fr/article/2015...[12] + +Notes + +[1[13]] Alors, oui, je sais, on dit police administrative ou services de +renseignements. Mais dans la tête de tout le monde, si on veut comprendre de +quoi on parle, ce sont les services secrets. Les gens qui surveillent la +population, qui surveillent les agitateurs, qui surveillent les espions +étrangers chez nous, qui espionnent à l'étranger pour nous. Et le tout embourbé +d'une épaisseur de secret telle que personne ne sait jamais ce qu'ils font. + +[2[14]] Oh, pardon, non. Le rythme infernal justifié par l'urgence absolue +d'adopter dans la semaine un texte qu'on attend depuis 10 ans, et qui mérite +qu'on change des dispositions majeures le jour même du vote définitif au Sénat, +dispositions qui avaient à peine 10 jours... Ça doit être lié à une vraie +urgence, hein, ça ne peut pas être pour permettre au gouvernement de s'octroyer +des pouvoirs en s'assurant que personne n'y a regardé de plus près... + +[3[15]] Ça veut dire ami de la cour, c'est un texte qui est transmis au Conseil +pour lui proposer un éclairage sur certains points du débat, pour l'aider dans +sa lourde tâche. Le Conseil en fait par la suite ce qu'il veut, le lire, ou +pas, caler une armoire normande avec. Aucune obligation. + +Liens: +[1]: http://blog.fdn.fr/?post/2015/06/23/Request-for-comments#pnote-80-1 (lien) +[2]: http://www.senat.fr/amendements/2014-2015/521/jeu_complet.html (lien) +[3]: http://blog.fdn.fr/?post/2015/06/23/Request-for-comments#pnote-80-2 (lien) +[4]: http://x.fdn.fr/blog37 (lien) +[5]: http://x.fdn.fr/blog40 (lien) +[6]: http://x.fdn.fr/blog41 (lien) +[7]: https://numaparis.ubicast.tv/videos/fdn-contre-gouvernement/ (lien) +[8]: http://blog.fdn.fr/?post/2015/06/23/Request-for-comments#pnote-80-3 (lien) +[9]: http://www.fdn.fr/pjlr/amicus1.pdf (lien) +[10]: https://lqdn.co-ment.com/text/S2rnRkNZ68T/view/ (lien) +[11]: https://www.laquadrature.net/fr/publication-dun-memoire-citoyen-au-conseil-constitutionnel-contre-la-loi-renseignement (lien) +[12]: http://www.ffdn.org/fr/article/2015-06-23/pjl-renseignement-vos-commentaires (lien) +[13]: http://blog.fdn.fr/?post/2015/06/23/Request-for-comments#rev-pnote-80-1 (lien) +[14]: http://blog.fdn.fr/?post/2015/06/23/Request-for-comments#rev-pnote-80-2 (lien) +[15]: http://blog.fdn.fr/?post/2015/06/23/Request-for-comments#rev-pnote-80-3 (lien) |